Lettre de l’OPMNAM au président de la Répu­blique

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Permet­tez à un orphe­lin d’un Malgré-Nous raflé par la Gestapo, déporté à partir du terri­toire natio­nal, incor­poré de force sous peine de repré­sailles par les nazis sur sa famille et son fils à peine âgé de trois semaines, de vous féli­ci­ter et de vous remer­cier pour votre discours très émou­vant lors de la commé­mo­ra­tion natio­nale du 65e anni­ver­saire de la libé­ra­tion à Colmar.

Vos paroles très fortes et justes vont aller droit au cœur des dizaines de milliers de familles alsa­ciennes et mosel­lanes et, je l’es­père, de nos compa­triotes souvent très peu infor­més « du drame des « Malgré-Nous », l’un des plus poignants de notre histoire commune avec l’Al­le­magne », dixit votre message du 11 novembre 2009.

Aurions-nous voulu conce­voir ce message, que nous n’au­rions pas fait mieux ! Tout y est, les combats diffi­ciles de libé­ra­tion, la déter­mi­na­tion du Gal. De Gaulle, le rôle éminent des troupes françaises et l’ap­port de la résis­tance, malgré l’ab­sence bien invo­lon­taire des 130 000 incor­po­rés de force dans la force de l’âge.

Qu’un Président de la Répu­blique soit venu en Alsace pour répa­rer l’injus­tice qui leur est faite depuis plus de 65 ans et leur ait rendu leur honneur ne peut que concou­rir à refer­mer les plaies mal cica­tri­sées et apai­ser les souf­frances de « ce lourd silence teinté de soupçons. »

Vous êtes le premier Président de la Répu­blique qui, lors d’une grande commé­mo­ra­tion natio­nale, après celle du 11 novembre dernier, les recon­naisse enfin comme « victimes du nazisme », auquel il n’est nul besoin d’ajou­ter barba­rie, un pléo­nasme, « victimes du pire régime d’op­pres­sion que l’his­toire ait connu et d’un véri­table crime de guerre »

Et de condam­ner la colla­bo­ra­tion : « Je veux dire que ceux qui les ont aban­don­nés, ceux qui n’ont rien fait pour empê­cher cette igno­mi­nie perpé­trée contre des citoyens français, ont trahi les valeurs de la France et l’ont désho­no­rée. La colla­bo­ra­tion fut une trahi­son et un déshon­neur ».

Merci d’avoir eu une pensée pour « la douleur des familles et de leurs enfants », dont nous leurs orphe­lins, et d’avoir rappelé à nos compa­triotes « que les menaces de repré­sailles qui pesaient sur les familles, ne leur lais­sait pas le choix ».

Rappe­lons que sans la défaite éclair humi­liante de 1940 où combat­tirent la majo­rité de nos pères et la honteuse colla­bo­ra­tion, lais­sant le champ libre aux nazis en Alsace-Moselle, il n’y aurait pas eu cette incor­po­ra­tion de force massive de 130 000 citoyens français, ni 40 000 tués ou portés dispa­rus, ni 20 000 orphe­lins et autant de veuves.

Devant le souci louable de répa­rer une injus­tice, par la recon­nais­sance offi­cielle du Président de la Répu­blique du drame et de l’aban­don de l’Al­sace-Moselle, par la faute inex­cu­sable du gouver­ne­ment colla­bo­ra­tion­niste malgré ses protes­ta­tions modé­rées, à la demande expresse de Pétain, peu audibles, nous ne ferons pas état de nos diver­gences avec les services de l’Etat, la justice admi­nis­tra­tive, le Bundes­tag, la Cour Euro­péenne des Droits de l’Homme.

Il n’en demeure pas moins et nous savons, Monsieur le Président de la Répu­blique, que nous pouvons comp­ter sur vous, pour que ce dernier conten­tieux avec les Orphe­lins de Pères « Malgré-Nous », se règle entre pays deve­nus amis. Dans ce cadre, nous ferons de nouvelles propo­si­tions.

Rece­vez, Monsieur le Président de la Répu­blique, l’ex­pres­sion de notre haute consi­dé­ra­tion.

Le Président de l’OPMNAM Bernard ERNEWEIN, Orphe­lin d’un crime de guerre.

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