Tambov. Le camp des Malgré-Nous

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TAMBOV.jpg Le rapa­trie­ment et la traduc­tion des archives sovié­tiques concer­nant le fameux camp de Tambov-Rada est à n’en pas douter un événe­ment pour l’his­toire des incor­po­rés de force alsa­ciens et mosel­lans et leurs familles, et pour l’his­toire de l’Al­sace et de la Moselle en géné­ral. La présente publi­ca­tion se place dans ce contexte.

On estime que 15 500 Français ont été prison­niers au seul camp de Tambov, dont une majo­rité d’in­co­po­rés de force d’Al­sace et de Moselle. Seuls 1 500 d’entre eux ont été libé­rés pour rejoindre les troupes françaises combat­tantes, les autres tentant de survivre aux effroyables condi­tions de capti­vité, puis aux pénibles condi­tions de rapa­trie­ment à partir de l’au­tomne 1945. Si certains évoquaient le chiffre allant jusqu’à 10/15 000 morts, on tendrait aujourd’­hui vers une esti­ma­tion bien plus basse : « entre 1 800 à 2 000 (dont au moins 1 300 Alsa­ciens) » (p.6) ou « sans doute entre 2 et 3000 » (p.93). Mais tous ces chiffres comprennent-ils les décès de l’hô­pi­tal de Kirsa­nov d’où peu de malades du camp de Tambov sont reve­nus ?

Après avoir évoqué le contexte de l’ins­tau­ra­tion du service mili­taire obli­ga­toire dans l’ar­mée alle­mande pour les Alsa­ciens-Mosel­lans en 1942, dont le « succès » ne peut se comprendre que par les sanc­tions brutales exer­cées sur les insou­mis et leurs familles par les nazis, le camp est lui aussi replacé dans son contexte. C’était à l’ori­gine un camp de filtrage pour soldats sovié­tiques suspects et il faisait partie de la nébu­leuse des camps de prison­niers (de guerre et autres) répar­tis sur le terri­toire de l’URSS.

Les fameux « 1 500 » libé­rés en juillet 1944 sont bien sûr évoqués à plusieurs reprises. Selon les actua­li­tés de l’époque, il s’agis­sait d’un échange de prison­niers : 1 500 Russes se trou­vant en France contre 1 500 Français se trou­vant à Tambov. Evidem­ment, on peut s’in­ter­ro­ger sur le sort de ces prison­niers russes lorsqu’on se souvient de l’af­fir­ma­tion de Staline : « Il n’y a pas de prison­niers de guerre sovié­tiques, il n’y a que des traîtres » (p.12). Ceci pour­rait expliquer qu’il n’y ai plus eu d’autres échanges par la suite, alors que des renforts pour les troupes françaises auraient été les bien­ve­nus, notam­ment dans la remon­tée de la vallée du Rhône vers l’Al­sace ; le fait « que beau­coup d’uni­tés voulaient récu­pé­rer ces 1 500 » (p.71) le suggère forte­ment.

Les rapa­trie­ments de prison­niers de guerre d’URSS n’ont repris qu’à l’au­tomne 1945 et le nombre des retours a décliné assez rapi­de­ment dès 1946 jusqu’en 1955. A partir de cette date, les Alsa­ciens-Mosel­lans signa­lés captifs ne furent pas retrou­vés.

On l’aura compris, à l’heure où les archives russes sont acces­sibles puisque traduites en français, cette inté­res­sante publi­ca­tion propose un tour d’ho­ri­zon de la ques­tion « Tambov » et, surtout, invite cher­cheurs, familles et histo­riens à les consul­ter, à les étudier. Dans l’im­mé­diat, pour appro­fon­dir la ques­tion, on pourra se repor­ter à www.malgre-nous où sont consul­tables témoi­gnages, listes, docu­ments et biblio­gra­phie.

Nico­las Mengus

J. Fortier (dir.), Tambov. Le camp des Malgré-Nous alsa­ciens et mosel­lans prison­niers des Russes, les révé­la­tions des archives sovié­tiques, La Nuée Bleue, 2010, 144 p., 25 €

7 Responses to Tambov. Le camp des Malgré-Nous

  1. Wolff dit :

    Toujours en recherche des liste des prisonniers à Tambov-Rada et particulièrement de Jean-Robert Vonbank dcd sur place fin mai 1945.
    Cordialement
    Jacques Wolff

  2. Subra dit :

    Bonjour,
    Je chercher à savoir si le frere de ma grand mere, Alfred Lienhardt (parfois orthographié Lienhard sur certains registre) de Ingwiller (67) etait à Tambov, et le cas échéant si il etait décédé.
    Il aurait été vu la bas à la fin de la guerre, mais je n en retrouve aucune trace.
    Bien Cordialement
    Florent Subra

    • Nicolas Mengus dit :

      Bonjour

      Je viens de mettre un avis de recherche en ligne. Faites aussi une demande auprès du Pôle des archives des Victimes des conflits contemporains

      11 rue Neuve Bourg L’Abbé
      BP 552
      14037 CAEN cedex
      Tel : 02 31 38 45 82
      Courriel : shd-caen.courrier.fct@intradef.gouv.fr.

      Ils ont certainement un dossier le concernant et peuvent, moyennant une participation financière aux frais de reproduction et de port, vous le photocopier.

      Merci de me tenir informé de la progression de vos recherches.

      Cordialement,

      Nicolas Mengus

  3. Emma dit :

    Bonjour,
    Ou puis je trouver des informations sur une jeune fille arrêtée en Alsace Lorraine pendant cette guerre ? Visiblement arrêtée dans un train.
    Y a t’il comme sur votre site la même chose pour les femmes ?

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