- CAEN3 – Fichier des Incorporés De Force (IDF) « Morts Pour La France » (BAVCC-Caen) – version de 2007
- REP-1946 – Registre des non-rentrés en 1946
Article paru dans les DNA du 20.1.2020 transmis par Yves Scheeg :
Malgré-nous : à la recherche de l’oncle disparu en Lituanie
Il y a cinq ans, Marie-Josée Adam (épouse Cupillard) et son frère Paul ont appris que leur oncle Edouard Adam, Malgré-nous, était enterré en Lituanie où il a été tué le 13 octobre 1944. Ils ont fait le voyage l’été dernier en cette année du 75e anniversaire de la Libération.
Nous sommes de plus en plus nombreux à nous interroger sur le parcours de nos ancêtres pendant la Deuxième Guerre mondiale, qu’ils aient été acteurs ou victimes de ce conflit. Dans les familles, il ne reste que très peu de témoins directs de ces batailles qui ont séparé tant de familles. Et pour toutes les générations nées après la guerre, la mémoire de cette période ne s’est pas toujours bien transmise. Au final, nous méconnaissons très souvent l’histoire de nos proches.
C’est un peu par hasard qu’après le décès de son père Albert, il y a cinq ans, Marie-Josée découvrit dans ses papiers divers documents sur son oncle Édouard, né le 2 mai 1922 à Nordheim, où il vécut avec ses parents jusqu’à la fin de sa scolarité. Il travailla chez Georges Klein comme ouvrier agricole jusqu’à son incorporation de force dans l’armée allemande.
« Nous ne connaissions pas grand-chose de l’oncle Édouard »
Intrigués par l’existence de cet oncle dont ils n’avaient qu’une connaissance très vague, Marie-Josée et son frère s’intéressèrent alors de plus près à ce parent tué à Liepalofai, en Lituanie le 13 octobre 1944. « Nous ne connaissions pas grand-chose de l’oncle Édouard, ses frères parlaient rarement de lui. Notre père (Albert) était lui-même incorporé en 1943 et fait prisonnier à Tambov, il n’apprit la mort de son frère qu’à son retour de captivité en août 1945 », raconte Marie-Josée.
Déjà affecté par la mort de sa maman pendant sa captivité (Joseph Bohn, autre habitant de Nordheim également prisonnier à Tambov lui avait appris la triste nouvelle), un nouveau coup dur frappait Albert et Gérard, ses frères, à l’annonce de la disparition d’un des leurs.
Retracer l’itinéraire d’un soldat n’est pas une chose aisée. Et reconstituer sa vie est souvent un véritable « parcours du combattant ». Ce n’était pas vraiment l’objectif de Marie-Josée et de son frère qui se mirent toutefois en quête de retrouver une trace de leur oncle.
Avec le peu d’éléments qu’elle possédait, Marie-Josée découvrait quelques minces informations, d’abord via internet, ensuite à travers l’association des « Malgré-nous » en Alsace. « Nous n’avons pas trouvé écho à notre demande. Cependant, on nous a conseillé de contacter le « Volksbund Deutsche Kriegsgraberfursorge » (VDK, l’organisme allemand en charge de l’entretien des tombes) qui, dans un premier temps, nous a répondu que ce nom leur était inconnu. »
Paul et Marie-Josée ne baissent pas les bras et réitèrent leur demande en modifiant l’orthographe d’Edouard en Eduard comme le leur suggérait le VDK. Qu’elle ne fut leur surprise de lire les lignes suivantes : Eduard Adam repose au cimetière de Kaunas Sanciai Endgrablage Blocks 5, Reihe 10, Grab 524.
Marie-Josée montra ces informations à son frère Paul qui prit la décision d’aller à Kaunas se recueillir sur la tombe de leur oncle. Le frère et la sœur ont finalement entrepris ce voyage l’été dernier. Et ce ne fut pas de tout repos. Au bout de 1 600 km et moult péripéties « malgré les cartes routières et GPS, nous nous sommes perdus, c’est finalement un habitant qui nous a guidés vers le cimetière ».
« C’était un grand moment d’émotion »
Finalement, Marie-Josée et Paul, accompagnés de leurs conjoints se sont retrouvés devant la sépulture. Sur la croix en pierre, sous deux noms de soldats allemands figuraient ces inscriptions : « Eduard Adam, Grenadier *2.5.1922 +13.10.1944 ».
« C’était un grand moment d’émotion, nous avions emporté un peu de terre de Nordheim que nous avons parsemée sur la tombe. Nous nous sommes longuement recueillis sur cette tombe, et en repartant, nous avons accroché un petit cœur aux couleurs de l’Alsace. »
Ce voyage restera à jamais gravé dans les mémoires et dans les cœurs de Marie-Josée et Paul. Ils n’auront qu’un regret, celui de n’avoir pu partager cette émotion avec Albert, leur papa et l’oncle Gérard, les frères d’Édouard.