Albert Spetz, 93 ans, de Roderen, a participé il y a 70 ans à la libération de Cernay au terme d’un long périple qui l’a conduit à porter cinq uniformes différents. Il fait partie des 1 500 Alsaciens libérés de Tambov en 1944 puis engagés dans les armées alliées.
Ils ne sont plus très nombreux les Alsaciens vétérans de Tambov faisant partie du groupe des 1 500. Les 1 500 sont le groupe d’incorporés de force libérés dès juillet 1944 sur intercession des alliés et partis rejoindre les rangs des Forces françaises libres pour participer à la libération du territoire national. L’histoire d’Albert, celle qui a mêlé son destin à la grande, a commencé en janvier 1943 par un ordre d’appel pour la Wehrmacht. « Nous avons pris en gare de Cernay, un train spécial en direction de l’Allemagne », témoigne-t-il auprès de Paul Brun dans le livre édité en 1995 par la Société d’histoire et d’archéologie de Cernay et environ : « La bataille d’Alsace, 4 février 1945 : Cernay, Steinbach, Uffholtz, Wattwiller libérées ».
Expédié sur le front russe vers Orel, le jeune homme trouve le courage de déserter le 10 septembre 1943 lors d’un « repli forcé ». Fait prisonnier par les Soviétiques, il est expédié fin octobre à Tambov. Il aura la chance de n’y séjourner que huit mois. Au sein des 1500, rebaptisé Groupement d’instruction des Français rapatriés de Russie, Albert Spetz entreprend un lent retour vers son village natal, Roderen.
Outre le vert-de-gris, il aura porté l’uniforme de l’armée rouge lorsqu’il était prisonnier, puis celui des Anglais, des Américains et enfin celui des FFL.
« Débarqués à Marseille le 27 novembre, nous avons rejoint le camp d’Aubagne. Nous étions enfin de retour chez nous en France », se réjouit-il dans le même ouvrage. Fin 1944, il rejoint le 3e groupement de choc du colonel Bouvet à Giromagny, à quelque vingt kilomètres de chez lui. « J’allais pouvoir enfin revoir ma famille que j’avais quittée 18 mois plus tôt et qui était sans nouvelle ».
Son fils a aménagé une intéressante carte interactive retraçant son périple, dans l’église du village de Roderen
Sa permission de 48 heures passée, Albert Spetz va participer avec son unité aux intenses combats du Nonnenbruch, les plus terribles d’une guerre qui l’emmènera ensuite outre-Rhin, cette fois-ci nous plus sous l’uniforme des Malgré-nous mais sous celui des forces alliées. Il sera mobilisé le 31 octobre 1945.
Son fils, André Spetz, correspondant de presse aux Dernières Nouvelles d’Alsace, a rendu hommage à son père et aux 1 500 Alsaciens évacués de Tambov dès l’été 1944. Une petite exposition, installée à demeure dans l’église de Roderen, retrace l’épopée des 1 500 au travers d’une intéressante carte interactive où des points lumineux figurent toutes les villes par lesquelles sont père est passé depuis son départ de Roderen un jour de janvier 1943.
Avis paru dans les DNA du 2.3.2017