Joseph Haller[[Le parcours de Joseph Haller est simplement retracé ici, car il a déjà fait l’objet de plusieurs publications dont R. Epp, L’enfer sur terre: prêtres et religieux d’Alsace internés et déportés par les nazis (1940–1945), Strasbourg, 2000, p. 119–124 ou dans L’Ami hebdo Lorraine du 20.2.2005. La documentation nous a été aimablement fournie par M. Jacky Bergdoll, de Bitche.]] est né à Schrobach (Moselle), le 22 août 1909. En tant que membre de la Congrégation des Rédemptoristes (il a été ordonné prêtre à Luxembourg en 1934), il est administrateur des paroisses des Hambach et de Kerprich-les-Dieuze (ancien nom de Val-de-Bride, avant la fusion de la commune avec celle de Guénestroff en 1973), en Moselle, entre 1940 et 1943.
Joseph Haller appartenait alors à une filière de passeurs. Ce réseau fournissait de faux papiers aux prisonniers de guerre français candidats à l’évasion ou aux réfractaires à l’incorporation de force, puis il les faisait passer la frontière allemande à pied, par Moyenvic (alors tout proche de la frontière), ou par le train de Dieuze jusqu’à Nancy. Joseph Haller avait donné à un de ces jeunes une lettre destinée à son frère qui résidait alors à Bordeaux. Le jeune a été capturé et Joseph Haller a été arrêté dans son presbytère de Kerprich-lès- Dieuze, le 27 décembre 1943.
Du Fort de Queuleu au camp de Dachau
Accusé d’aider à s’évader des prisonniers de guerre français et des Alsaciens-Mosellans réfractaires à l’incorporation de force ou déjà enrôlés dans l’Armée allemande, il est incarcéré dans au Fort de Queuleu, à Metz.
A peine arrivé, ses yeux sont bandés. On lui défend de l’ôter sous peine de mort. Il est ensuite conduit dans une salle où se trouvent d’autres détenus. Il est assis sur un tabouret, les mains liées. Ayant réussi à faire légèrement glisser son bandeau, il constate qu’il se trouve parmi d’autres détenus. Eux aussi ont les yeux bandés et les mains liées. C’est d’ailleurs ainsi que les prisonniers font leurs besoins naturels, à heures fixes, dans un seau placé derrière un paravent. La salle, bien éclairée, est sous la surveillance d’un jeune gardien armé d’un fusil. Malheur à celui qui s’endort : il est aussitôt réveillé par des coups de crosses sur la tête. La nourriture est maigre. Les prisonniers ont le droit de s’allonger, sur le dos et toujours ligotés, entre 20 heures et 5 heures le lendemain.
Joseph Haller est ensuite transféré dans la prison de la rue du Fil, à Strasbourg, en wagon cellulaire. Il est stupéfait lorsqu’un des gardes SS ouvre la porte et lui tend un casse-croûte en lui disant « Vous êtres prêtre » et en lui souhaitant « bonne chance ». Après quelques jours à Strasbourg, il est transféré, en tant que NN (“Nacht und Nebel ”, « Nuit et Brouillard ») au camp de concentration du Struthof, à Natzwiller. Il y arrive le 19 janvier 1944. Il est le deuxième prêtre, après André Bidaux, à être enfermé dans ce camp. Il préfère cependant se faire passer pour un enseignant.
Le 2 mars 1944, Joseph Haller arrive au camp de Dachau. Il y assiste, le 17 décembre 1944, à l’ordination clandestine de Karl Leisner par Monseigneur Piguet[[Voir, à ce sujet, Josefa Maria Imma Mack, Un ange à
Dachau – Pourquoi j’aime les azalées. Souvenirs du
camp de concentration de Dachau de mai 1944 à avril
1945, Paris, 2005.]]. Il reste à Dachau jusqu’à la libération de ce camp par les Américains, le 29 avril 1944. Joseph Haller est fait chevalier de la Légion d’honneur en 1972. Il décède le 19 octobre 2003, à l’âge de 94 ans, au couvent du Bischenberg, à Bischoffsheim (Bas-Rhin), dont il avait été le recteur de 1953 à 1956 et de 1970 à 1973.