Jean-Louis Schroetter est un de ces nombreux Alsaciens qui n’a pas connu son père. Ce dernier n’a pourtant pas été enrôlé de force dans la Wehrmacht. Il n’est pas mort ou porté disparu sur tel ou tel front. Il est mort en France, à Cahors (Lot), alors que les Allemands avaient déjà fui cette ville. Florent Schroetter est natif de Bergheim (Haut-Rhin), porte un nom à consonance germanique, maîtrise la langue allemande et, de surcroît, il est membre des Chantiers de Jeunesse Française. Lorsque Cahors est libéré sans combat (« pas une chicane, pas un coup de feu ») par les FTP le 17 août 1944, tous ces éléments – auxquels il faut ajouter une lettre anonyme – font de lui un collabo en puissance. Le soir du 18 août, un camarade FTP de Florent Schroetter vient le chercher, car le Maquis avait besoin d’un interprète. Sa femme ne le reverra jamais : incarcéré le lendemain, il est fusillé en toute illégalité le 20 août. A travers la longue et difficile quête de Jean-Louis Schroetter pour retrouver les traces de son père, victime de la haine des hommes pour leurs semblables et dont « la seule présence « visible » était une grande photo, celle d’un jeune homme en uniforme, accrochée dans la salle à manger », ce livre contribue à faire connaître la situation complexe des Alsaciens pendant et après la guerre et à soulever un pan du voile qui masque toujours encore le côté obscur de la Résistance.
Nicolas Mengus