Ques­tion sur la recon­nais­sance des pupilles de la Nation orphe­lins de guerre d’Al­sace.

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Ques­tion écrite n° 01219 de Mme Cathe­rine Troendlé (Haut-Rhin – Les Répu­bli­cains) publiée dans le JO Sénat du 14/09/2017 – page 2844

Mme Cathe­rine Troendlé attire l’at­ten­tion de Mme la ministre des armées sur la recon­nais­sance des pupilles de la Nation orphe­lins de guerre d’Al­sace.

En 2000 et en 2004, sont parus deux décrets (décret n° 2000–657 et décret n° 2004–751) insti­tuant, pour le premier, une mesure de répa­ra­tion pour les orphe­lins dont les parents ont été victimes de persé­cu­tions anti­sé­mites, sous la forme d’une indem­nité au capi­tal de 27 000 € ou d’une rentre viagère de 468,78 € par mois et, pour le second, une aide finan­cière en recon­nais­sance des souf­frances endu­rées par les orphe­lins dont les parents ont été victimes d’actes de barba­rie durant la deuxième guerre mondiale, sous la forme d’une indem­nité au capi­tal de 27 440,82 € ou d’une rentre viagère de 468,78 € par mois.

Si ces mesures s’ins­crivent dans une recon­nais­sance et un trai­te­ment des orphe­lins de guerre, elles oublient néan­moins une caté­go­rie, celle des pupilles de la Nation orphe­lins de guerre d’Al­sace, dont les pères ont été incor­po­rés de force dans l’ar­mée alle­mande avant d’être envoyés sur le front russe, pour y mourir.

Ces pupilles alsa­ciennes sont autant victimes de la barba­rie nazie que celles des caté­go­ries évoquées par les deux décrets.

Il ne serait que justice de leur permettre d’ob­te­nir la même recon­nais­sance et les mêmes répa­ra­tions.

Aussi, elle lui demande de bien vouloir indiquer les inten­tions du Gouver­ne­ment pour recon­naître à leur juste titre les pupilles de la Nation orphe­lins de guerre d’Al­sace et pour leur attri­buer les mêmes répa­ra­tions qu’aux orphe­lins mention­nés par les décrets n° 2000–657 et n° 2004–751.

Trans­mise au Secré­ta­riat d’État, auprès de la ministre des armées

 

Réponse du Secré­ta­riat d’État, auprès de la ministre des armées publiée dans le JO Sénat du 26/10/2017 – page 3326

L’an­nexion de fait de l’Al­sace et de la Moselle par le IIIème Reich a comporté notam­ment l’in­cor­po­ra­tion forcée de jeunes Français dans l’ar­mée alle­mande. La secré­taire d’État auprès de la ministre des armées mesure plei­ne­ment l’éten­due du drame vécu par ces mili­taires et leurs familles au cours de la Seconde Guerre mondiale et souhaite rappe­ler que la France a reconnu leur situa­tion. En effet, le 1° de l’ar­ticle L. 111–2 du code des pensions mili­taires d’in­va­li­dité et des victimes de guerre (CPMIVG) dispose que les anciens mili­taires alsa­ciens et lorrains de la guerre 1939–1945, Français, soit par filia­tion, soit par réin­té­gra­tion, soit en exécu­tion du traité de Versailles, incor­po­rés de force par voie d’ap­pel, béné­fi­cient de la légis­la­tion sur les pensions mili­taires d’in­va­li­dité pour les services accom­plis dans les armées de l’Al­le­magne ou de ses alliés. L’ar­ticle L. 123–16 du même code précise que ces anciens mili­taires ont droit à pension dans les condi­tions fixées par le livre Ier du CPMIVG et, éven­tuel­le­ment, à toutes allo­ca­tions, indem­ni­tés, majo­ra­tions et supplé­ments de majo­ra­tions pour infir­mité résul­tant de bles­sures reçues, d’ac­ci­dents surve­nus, de mala­dies contrac­tées ou aggra­vées par le fait ou à l’oc­ca­sion du service. En outre, les orphe­lins des « Malgré-nous » ont égale­ment pu prétendre à un droit à répa­ra­tion confor­mé­ment aux dispo­si­tions de l’ar­ticle L. 142–1 du CPMIVG, tout comme ceux des Alsa­ciens et Mosel­lans réfrac­taires à l’in­cor­po­ra­tion forcée dans l’ar­mée alle­mande en appli­ca­tion de l’ar­ticle L. 143–1 du CPMIVG. Il convient d’ajou­ter que tous les orphe­lins de guerre, quel que soit leur âge, sont  ressor­tis­sant de l’of­fice natio­nal des anciens combat­tants et victimes de guerre et peuvent béné­fi­cier, à ce titre, de l’as­sis­tance de cet établis­se­ment public, dispen­sée notam­ment sous la forme d’aides ou de secours en cas de mala­die, absence de ressources ou diffi­cul­tés momen­ta­nées. Cepen­dant, il est souli­gné que l’in­dem­ni­sa­tion, mise en place par les décrets n°  2000–657 du 13 juillet 2000 insti­tuant une mesure de répa­ra­tion pour les orphe­lins dont les parents ont été victimes de persé­cu­tions anti­sé­mites et n°  2004–751 du 27 juillet 2004 insti­tuant une aide finan­cière en recon­nais­sance des souf­frances endu­rées par les orphe­lins dont les parents ont été victimes d’actes de barba­rie durant la Deuxième Guerre mondiale, est plus parti­cu­liè­re­ment desti­née aux victimes de la barba­rie nazie. Cette dernière renvoie à une douleur tout à fait spéci­fique, celle d’avoir perdu un père ou une mère, ou parfois les deux, dans un camp d’ex­ter­mi­na­tion. En effet, c’est fonda­men­ta­le­ment le carac­tère parti­cu­liè­re­ment insou­te­nable d’ex­trême barba­rie propre à ces dispa­ri­tions spéci­fiques à la Seconde Guerre mondiale, le trau­ma­tisme dépas­sant le strict cadre d’un conflit entre États, ainsi que la compli­cité du régime de Vichy, comme l’a rappelé le Président de la Répu­blique, qui sont à l’ori­gine de ce dispo­si­tif réservé aux enfants dont les parents, résis­tants ou ayant fait l’objet de persé­cu­tions anti­sé­mites ou raciales, sont décé­dés en dépor­ta­tion ou ont été exécu­tés dans les circons­tances défi­nies aux articles L. 342–3 et L. 343–5 du CPMIVG. Ce dispo­si­tif, qui traduit une certaine respon­sa­bi­lité de l’État français, doit rester fidèle à sa justi­fi­ca­tion essen­tielle qui est de consa­crer solen­nel­le­ment le souve­nir des victimes de la barba­rie nazie, à travers leurs enfants mineurs au moment des faits. Le main­tien de cette spéci­fi­cité a donc été décidé pour ne pas porter atteinte à la cohé­rence de ces décrets. Au-delà de cette analyse, l’exa­men de plusieurs dossiers a laissé appa­raître la diffi­culté d’ap­pliquer des critères stricts permet­tant de distin­guer des situa­tions extrê­me­ment proches. Le minis­tère des armées s’at­tache donc à étudier les dossiers en cause au cas par cas, afin de garan­tir une égalité de trai­te­ment, tout en confir­mant la néces­sité de préser­ver le carac­tère spéci­fique de cette indem­ni­sa­tion dont l’ex­ten­sion à tous les orphe­lins de guerre ne saurait être envi­sa­gée.

  • Merci à Serge Amorich pour l’en­voi de ce docu­ment.

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