Le décret du 25 août 1942 pris par les nazis à la conférence de Winnitza stipulait que les jeunes hommes alsaciens-mosellans devaient servir dans la Wehrmacht.
L’essentiel de la théorie nazie se trouvait dans Mein Kampf et les écrits de Rosenberg. L’incorporation de force ne figurait dans aucun texte, dans aucun programme. Le nazisme fut un dogme doublé d’un pragmatisme qui s’adaptait aux difficultés rencontrées. L’incorporation de force fut mise en oeuvre suite à l’enlisement de la Wehrmacht sur le front de l’Est. Les nazis avaient besoin de soldats. Ils contraignirent par la force et la menace et la menace de la déportation de leurs familles, les jeunes gens d’Alsace et de Moselle à combattre revêtus de l’uniforme nazi.
Le nazisme était fondé sur le concept de race. Seules les personnes de race aryenne pouvaient être citoyens du IIIe Reich, servir dans la Wehrmacht. Elle n’acceptait en son sein aucun étranger, aucun métèque. En théorie.
Les soldats de la Wehrmacht devaient combattre et mourir pour le peuple et la patrie (für Volk und Vaterland).
L’Allemagne nazie se considérait comme une race supérieur (ein Herrenvolk). Elle ne bradait pas sa nationalité. La nationalité était le corollaire de la race. Celle-ci était basée sur le droit du sang. Pour être allemand, il ne suffisait pas d’être né sur le sol du grand Reich, il fallait être le descendant d’une lignée d’Aryens.
Les nazis de voulaient pas de légion étrangère.
Pour intégrer des Français dans la Wehrmacht, les nazis inventèrent un nouveau concept juridique : le démembrement de la nationalité.
Le droit connait le démembrement de a propriété. Par exemple : en cas de vente d’un bien en viager, le vendeur garde l’usufruit du bien et l’acquéreur acquiert la nu-propriété.
Le démembrement de la nationalité : un certificat de nationalité allemande, à titre « temporaire », était remis aux incorporés de force à leur entrée dans la caserne. Le document conférant la nationalité allemande à titre « définitif » devait être remis à l’appelé lorsqu’il aurait donné des preuves de patriotisme allemand, fait selon l’expression d’un journal alsacien, son « Anschluss intérieur » (Paul Sérant, Les minorités ethniques).
Pour obtenir la nationalité allemande à titre définitif, – par une décision individuelle – il fallait être politiquement sûr. La consultation des Wehrpass (passeports militaires) nous indique à la rubrique « nationalité :
- soit Reichsdeutscher, dans la majorité des cas
- soit Volksdeutscher Elsass-Lothringen
Nous ignorons pour quels motifs nous trouvons deux nationalités différentes. Ce qui entraîne deux situations juridiques différentes pour les incorporés de force.
1er cas : En mourant sous l’uniforme nazi, les incorporés de force titulaires du certificat de nationalité allemande, ont donné de fait la preuve de leur patriotisme. Ils sont devenus allemands à part entière. Cela est incontestable.
En conséquence, l’Allemagne ne peut pas refuser à leurs ayants-droit (conjoint, enfants) les pensions qu’elle octroie à ses ressortissants. Il est incompréhensible que le gouvernement de la République Fédérale d’Allemagne se réfugie derrière des arguties juridiques. Cela est indigne de la part d’un « grand pays civilisé » selon l’expression employée par Maître Georges Nonnenmacher lorsque l’Allemagne a réclamé la forêt du Mundat lors des accords Schmidt-Giscard.
2e cas : Les incorporés de force morts sous l’uniforme nazi, auxquels avaient été attribués la nationalité « Alsacien-Lorrain » (*) sur leur Wehrpass, étaient des soldats d nationalité française obligés par la force de servir dans la Wehrmacht. Ils étaient des soldats étrangers dans la Wehrmacht, semblables aux soldats de la Légion étrangère, à la différence que ces derniers sont volontaires.
Ils ne sont pas morts allemands, ils sont morts français. Les déportés militaires sont des victimes du nazisme. Ils doivent être indemnisés à ce titre par l’Allemagne.
Notre armée compte une Légion étrangère au service de notre défense. En cas de décès au combat, les familles de ces soldats sont traitées comme celles de nos nationaux. Ils deviennent français par le sang versé.
3e cas : Enfin, les incorporés de force qui ont survécu à la guerre et qui ont eut la chance de revenir dans leur patrie ont retrouvé la nationalité française qu’ils n’avaient jamais perdue, selon les règles du droit international.
En conclusion, nous déplorons la mort, loin de leur patrie, de 40 000 jeunes hommes morts sans funérailles et sans sépulture pour 80% d’entre eux. Leur linceul était leur uniforme signé Hugo Boss, le couturier de la Wehrmacht. Leurs ayants-droit n’ont jamais été indemnisés. Quand ce scandale cessera-t-il ?
L’Allemagne veut diriger l’Europe et nous imposer sa loi, mais elle est incapable d’assumer son passé.
A l’instant où j’écris ces lignes, la radio annonce que l’Elysée précise dans un communiqué que les personnes âgées de plus de 70 ans (dont je fais partie- ne seront pas confinées après le 11 mai. Une mesure de bon sens. Madame Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, pédiatre (le Spiegel a parlé de sa thèse…), a déclaré péremptoirement que les personnes âgées devaient rester confinées jusqu’à la fin de 2020 – elle ignore le besoin de contacts sociaux des aînés -, une euthanasie douce qui rappelle le programme T4 (Tiergartenstrasse 4) de sinistre mémoire qui avait abouti à l’élimination de 200 000 personnes fragiles (vieillards et handicapés).
Jacques Brel avait raison de chanter : « Dame Bêtise, toi dont le règne et méconnu ». Chantons avec lui.
Renée Baudot
——————–
(*) Ce qui ne sera pas sans conséquence. Lors de l’inique procès de Bordeaux, le tribunal va reprendre cette qualification et il leur attribuera la nationalité alsacienne au lieu de la nationalité française. Une sottise ! Ces hommes sont nés français et ils mourront français.
Extrait de la carte d’identité civile d’un (futur) incorporé de force, combattant français en 39–40 : « Deutscher Volkszugehöriger – Elsässer » et …
… son Wehrpass : « Vd. Els. », « Volksdeutscher Elsässer ».
Extrait d’une carte d’identité alsacienne.
Extrait d’un Wehrpass alsacien.
Extrait d’un Wehrpass alsacien : « Volksdeutscher Elsässer »a été barré par le chef de compagnie et remplacé par D(eutsches) R(eich).
Extrait d’un Wehrpass alsacien : « Volksdeutscher Elsässer »a été barré et remplacé par D(eutsches) R(eich).
Extrait d’une carte d’identité mosellane.
Cet article est intéressant mais il comporte des inexactitudes et des erreurs. Pour ne prendre qu’un exemple, il est peu probable que les Malgré-nous décédés sans sépulture aient eu pour linceul « leur uniforme signé Hugo Boss, le couturier de la Wehrmacht”. Quels que soient ses torts, Hugo Boss n’était pas le couturier de la Wehrmacht. L’entreprise, qui comptait 98 collaborateurs en 1936, 239 en 1939 et 324 en 1955, n’aurait pas pu fournir tous ces uniformes ! Hugo Boss, qui n’était que l’une des 15 000 entreprises référencées par le Reichszeugmeisterei de Munich travaillait essentiellement pour le parti. Le rapport d’Elisabeth Timm, très précis, indique que « jusqu’à la fin de la guerre, la société a continué de produire des uniformes pour les NSDAP, SA, SS et HJ ; il y a aussi des traces indiquant qu’elle a également livré des uniformes à des officiers de la Wehrmacht et, enfin, qu’elle a continué à produire des vêtements de travail, de sport et de pluie. Que le parti ait été le seul client de l’entreprise, et à partir de quand cela aurait été éventuellement le cas, ne ressort pas clairement des sources.” Donc, tout au plus, des uniformes d’officier, sans doute des tenues de prestige sur demande pour quelques officiers. Je doute que nos Malgré-nous aient endossé de tels uniformes.
Merci pour ce genre d’étude qu’il est important de porter à la connaissance de nos concitoyens et des commentaires tels ceux de M. Sadoun. Beaucoup plus modestement, ne pourriez-vous pas corriger la faute de grammaire / de frappe dans la citation de Jacques Brel ?