Depuis la Normandie, deux tristes nouvelles sont adressées aux Malgré-Nous, mais également à toute la population d’origine alsacienne et mosellane.
En juin, juillet, août 1944, des Normandes, des Normands aidèrent et parvinrent à faire déserter des compatriotes Alsaciens. Ces derniers étaient dans leur grande majorité incorporés de force dans la sinistre division « Das Reich ». Ces Normandes, ces Normands prirent des risques énormes. Cependant ils osèrent.
Première triste nouvelle : ce 22 décembre 2011, a été inhumé André LEMARQUIER. Il était âgé de 97 ans. André, agriculteur, aida 5 incorporés de force dans la Waffen SS à déserter. Un 6ème de ce groupe, pris de peur pour ses parents, n’osa partir. C’était le 17 juillet 1944. André donna de la nourriture et aussi une carte de France, prélevée dans son livre d’écolier. La désertion réussit. Les enfants d’un déserteur, sont venus en août dernier, remercier le sauveur de leur père.
Après la cérémonie religieuse, et l’inhumation dans le cimetière, la famille d’André a réuni près de 30 personnes dans une auberge de Notre Dame de Cénilly commune natale d’André.
Cette réunion avait pour but, de porter à la connaissance des personnes réunies, l’extraordinaire acte de patriotisme d’André LEMARQUIER et de Roger HÉBERT. Roger HÉBERT, instigateur et conseiller de cette désertion était présent. Beaucoup de personnes ont ainsi découvert ce que fut – racontée par un Normand – l’annexion illégale de l’Alsace et de la Moselle et cette honteuse incorporation de force. Spontanément, deux auditeurs sont venus dire leur participation presque directe à la désertion de Français d’Alsace.
Curieuse coïncidence, l’auberge dans laquelle eut lieu cette réunion était en 1943, fréquentée par un incorporé de force de Riquewihr. Il rencontra à Notre Dame de Cénilly des sympathies. Il déserta en août 1943. Sa désertion fut stoppée à Paris. Envoyé sur le front de l’Est il en est revenu. Cet Alsacien parfaitement trilingue était chargé de l’approvisionnement en nourriture de son unité.
Un brave monsieur, au cours de cette réunion a tenu des propos élogieux sur ce Français de Riquewihr.
Seconde triste nouvelle : ce 23 décembre 2011 ont eu lieu à Agon-Coutainville, les obsèques de Georges HIRONDEL. Il était âgé de 90ans. Lui aussi, est un bienfaiteur de l’Alsace.et de la Moselle.
Après les bombardements de Coutances les 6 et 7 juin 1944, des séminaristes, et leur directeur le Chanoine FAUVEL – futur évêque de Quimper – apportèrent soins, secours et soulagements aux blessés. L’hôpital de Coutances était replié à Agon-Coutainville.
Du front immobilisé, dès la fin juin 1944, près de La Haye du Puits, dans la presqu’île du Cotentin, deux incorporés de force dans la Waffen SS parvinrent à déserter. Après d’inimaginables péripéties, ils parvinrent par le plus grand des hasards à Agon-Coutainville. Ils allèrent frapper à la porte du curé de la paroisse : l’Abbé BAILLEUL. Il les remit à des résistants, donc au Docteur GUILLARD, Directeur de l’hôpital, mais aussi Maire de Coutances, nommé par Vichy, sur la foi de faux renseignements. Ce fut leur chance. Bref, le Docteur GUILLARD fit plâtrer les 2 déserteurs et les dissimula parmi les véritables blessés. Georges HIRONDEL en avait la protection et la responsabilité. Les déserteurs échappèrent ainsi, miraculeusement aux griffes nazies. Cela leur a permis d’achever leurs héroïques odyssées dans la première Armée Française. Ils ont participé à la libération de l’Alsace.
Georges HIRONDEL n’a pas poursuivi la voie théologique, Docteur es Lettres, il fut Conservateur des Hypothèques à Paris.
Des faits de désertion, ou plus simplement parfois, de protection de nos compatriotes alsaciens et mosellans, se découvrent de plus en plus. Pour cette raison, un tel état de faits, impose à tous un devoir de vérité. Il y va de notre honneur de faire en sorte que l’ignorance, engendrée par la falsification des faits historiques, disparaisse.
Notre province la Normandie, est éloignée de notre autre province l’Alsace et de la Moselle. Fort heureusement, il n’y a pas de distance pour les sentiments. Voilà pourquoi, lors de notre prochain voyage en Alsace, nous demanderons à chacun des Malgré-Nous de notre connaissance, venus en Normandie, un peu de terre de son jardin, de sa commune.
Ces terres alsaciennes et mosellanes, seront mises dans des jardinières destinées à orner, les sépultures des Normands qui portèrent secours aux Alsaciens. Dans ces jardinières, des fleurs provenant des jardins des familles normandes qui secoururent, seront plantées.
Cette initiative, est d’un caractère strictement privé, entendez par là que si elle agréait les autorités régionales élues, nous en serions ravis.
Jean BÉZARD