Le billet d’hu­meur de Renée Baudot : De la néces­sité d’un Ambas­sa­deur de la Repen­tance

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Konrad Adenauer, le magi­cien des mots qui voulait trans­mu­ter leur sens en faisant passer « les meur­triers » pour des « victimes » du nazisme selon les mots d’une Alle­mande très coura­geuse qui a dénoncé publique­ment la masca­rade poli­tique de la CDU et du SPD, qu’elle quali­fiait de partis siamois.

Après la Seconde Guerre mondiale, Adenauer était le chan­ce­lier d’une Alle­magne exsangue écono­mique­ment, au ban des nations civi­li­sées. Il quémanda la récon­ci­lia­tion franco-alle­mande auprès de l’homme de 18 juin 1940, auréolé d’un pres­tige inter­na­tio­nal. Celui-ci accepta et nos a donné de « grandes vacances », la Paix, sans être dupe des inten­tions de son inter­lo­cu­teur.

Les « poli­ti­chiens », selon l’ex­pres­sion du Géné­ral, applau­dis­saient des deux mains la récon­ci­lia­tion franco-alle­mande. Ils compre­naient qu’elle serait un accé­lé­ra­teur de la construc­tion euro­péenne qui ouvrait des pers­pec­tives autant commer­ciales qu’in­di­vi­duelles.

L’Eu­rope, dont les hommes poli­tiques nous ont répété pendant des décen­nies qu’elle nous appor­te­rait la Paix (après la guerre au Kosovo, le bombar­de­ment de Belgrade, un risque d’em­bra­se­ment géné­ra­li­sé…), le plein emploi (plus de 30 millions de chômeurs dans toute l’Eu­rope), la pros­pé­rité (chaque citoyen voit son pouvoir d’achat s’ame­nui­ser de manière inexo­rable),se révèle une immense machine bureau­cra­tique dont il est diffi­cile de quali­fier le bilan de réus­site.

Le Parle­ment euro­péen compte 720 dépu­tés en prove­nant de 27 états membres, dont 81 dépu­tés français. Je n’ai pas connais­sance qu’ils aient consa­cré une seule heure à évoquer le problème de l’In­cor­po­ra­tion de Force, un problème majeur de la Seconde Guerre mondiale, au Parle­ment de Stras­bourg. En effet, il concerne 8 pays euro­péens, sans comp­ter l’URSS avec 750 000 enrô­lés de force dont 275 000 furent tués, selon les chiffres four­nis par le Volks­bund.

Il est scan­da­leux que, 80 ans après la Seconde Guerre mondiale, ce problème ne soit pas réglé. Pour nos hommes poli­tiques, il n’est pas prio­ri­taire, aussi faut-il que tous ceux qui sont concer­nés, notam­ment les descen­dants des dépor­tés mili­taires dont la vie a été obérée par ce trau­ma­tisme qui va se trans­mettre tant qu’il ne sera pas réglé, se mobi­lisent en cessant d’être invi­sibles. Je souhaite que notre légi­time combat passe de l’ombre à la lumière.

Avec le président Jacques Chirac, nous sommes entrés dans l’ère de la Repen­tance dont nous ne voyons pas la fin. Nous sommes les seuls en Europe à mani­fes­ter ce zèle tandis que l’Al­le­magne main­tient son statut de Déser­teur de la Repen­tance.

L‘Al­le­magne refuse avec une obsti­na­tion puérile de recon­naître l’In­cor­po­ra­tion de Force comme crime contre l’Hu­ma­nité et se réfu­gie derrière des  » argu­ties juri­diques  » selon la formule de Gregor Gysi, le fonda­teur du parti des Linke.

Des esprits aver­tis disent que les jeunes Alle­mands refusent d’en­dos­ser la culpa­bi­lité des crimes commis par leurs grand-parents ainsi qu’une éven­tuelle indem­ni­sa­tion. J’ignore quelles sont les véri­tables raisons.

 Pour débloquer la situa­tion, je fais une sugges­tion : la créa­tion par la Répu­blique Fédé­rale d’Al­le­magne d’un poste d’Am­bas­sa­deur itiné­rant de la Repen­tance. Il me semble souhai­table que le titu­laire de ce poste soit un offi­cier  supé­rieur qui connaisse parfai­te­ment l’his­toire mili­taire du IIIème Reich et de la 1ère guerre mondiale . Il aurait pour mission de parti­ci­per aux commé­mo­ra­tions des batailles et des grands massacres dans les diffé­rents pays euro­péens et du Moyen-Orient.

L’Am­bas­sa­deur de la Repen­tance se rendrait dans les divers pays où le délire des géné­raux nazis a entraîné des soldats drogués – à la pervi­tine – à commettre des massacres horribles : exemples en Biélo­rus­sie où il y eu 625 (six cent vingt-cinq) Oradour-sur-Glane.

Un grand pays a le devoir d’en­voyer un de ses repré­sen­tants présen­ter des excuses offi­cielles  à des popu­la­tions qui restent trau­ma­ti­sées  par le passage des « Huns » du IIIème Reich. Je déplore l’im­po­li­tesse indé­cente de la chan­ce­lière Angela Merkel qui se croyait auto­ri­sée à donner des leçons de « Droits de l’Hom­misme » au président biélo­russe Luga­chenko.

Cela consti­tue­rait un tour­nant dans la poli­tique mémo­rielle de la Répu­blique Fédé­rale d’Al­le­magne. Elle y gagne­rait le respect des popu­la­tions des pays victimes des massacres qui se sentent aban­don­nées à leur douleur et mépri­sées par une Alle­magne triom­phante dont le seul but est de domi­ner l’Eu­rope.

Voya­ger dans les diffé­rents pays euro­péens permet de consta­ter le ressen­ti­ment des classes moyennes et popu­laires envers l’Al­le­magne qu’ils soupçonnent d’en­vi­sa­ger la crea­tion d’un IVème Reich. Parler à l’homme de la rue permet d’en­tendre un discours qui n’a aucun point commun avec celui des élites.

La classe diri­geante, par son style de vie, a de nombreux contacts dans les sphères inter­na­tio­nales les plus élevées avec lesquelles elle forme une même classe sociale supé­rieure soucieuse de la préser­va­tion de ses inté­rêts et de son pouvoir.

Gardons espoir. Et agis­sons. Les 40  000 morts sont à nos côtés. Qu’ils veillent sur nous et nous inspirent.

Le 23 novembre 2024, nous avons commé­moré le 80ème anni­ver­saire de la libé­ra­tion de Stras­bourg. Je pensais que l’Al­le­magne serait repré­sen­tée par les plus hautes auto­ri­tés à savoir Monsieur le président Walter Stein­meier ou Monsieur le chan­ce­lier Olaf Scholz. Ni l’un, ni l’autre n’étaient présents. Seul Monsieur l’am­bas­sa­deur repré­sen­tait son pays.

Le 80ème anni­ver­saire de la libé­ra­tion de Stras­bourg, siège du Parle­ment euro­péen repré­sen­tait une oppor­tu­nité pour l’Al­le­magne de présen­ter ses excuses offi­cielles à l’Al­sace et à la Moselle et de recon­naître l’In­cor­po­ra­tion de Force comme crime contre l’Hu­ma­nité.

 Je rappel­le­rai : 

  • que l’an­nexon de nos trois dépar­te­ments s’est faite en viola­tion de la Conven­tion d’Ar­mis­tice et des trai­tés inter­na­tio­naux.
  • que l’Al­le­magne nazie a capi­tulé sans condi­tion le 08 mai 1945, ce qui signi­fie en accep­tant la loi et les exigences des vainqueurs. Notre pays était assis à la table des vainqueurs.
  • qu’au au procès de Nurem­berg, Edgar Faure, procu­reur pour la France, a quali­fié l’In­cor­po­ra­tion de Force de  « crime contre la condi­tion humaine », c’est-à-dire de crime contre l’hu­ma­nité. Edgar Faure fut ministre du géné­ral De Gaulle et profes­seur agrégé de droit à l’Uni­ver­sité.

   Le crime contre l’hu­ma­nité est établi pour les motifs suivants :

  • un crime d’État décidé par Hitler, Keitel et les deux Gaulei­ter Burckel et Wagner.
  • un crime de masse : 145 000 jeunes enrô­lés dont 8500 jeunes femmes.
  • un crime  inscrit dans la durée :  de 1942 au 8 mai 1945.
  • un crime raciste : les recrues devaient prou­ver qu’elles n’étaient ni juives , ni demi-juives : elles étaient recon­nues comme appar­te­nant à la race aryenne.

  Ce sont les faits et les faits sont têtus et fini­ront par s’im­po­ser.

  Renée Baudot, le 28 novembre 2024 

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