Ques­tion écrite n° 8245 de M. Raphaël Schel­len­ber­ger et sa réponse publiée au JO le 12/06/2018 – Docu­ment trans­mis par Serge Amorich

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Ques­tion écrite n° 8245 de M. Raphaël Schel­len­ber­ger (Les Répu­bli­cains – Haut-Rhin) publiée au JO le 15/05/2018 page : 3972

Réponse publiée au JO le 12/06/2018 page : 5016

Date de chan­ge­ment d’at­tri­bu­tion: 22/05/2018

Texte de la ques­tion

M. Raphaël Schel­len­ber­ger inter­roge Mme la ministre des armées sur l’oc­troi d’une aide finan­cière aux orphe­lins dont les parents, « Malgré Nous » d’Al­sace-Moselle, ont été enrô­lés de force dans la Wehr­macht. Le décret n° 2004–751 du 27 juillet 2004 insti­tuant une aide finan­cière en recon­nais­sance des souf­frances endu­rées par les orphe­lins dont les parents ont été victimes d’actes de barba­rie durant la Deuxième Guerre mondiale ne permet pas, en l’état actuel, d’ins­tau­rer des mesures de répa­ra­tion à l’égard des enfants orphe­lins de parents « Malgré Nous » morts pendant la Deuxième Guerre mondiale. Le 8 mai 2010, lors de la commé­mo­ra­tion du 65ème anni­ver­saire de la Victoire du 8 mai 1945, le Président de la Répu­blique Nico­las Sarkozy avait exprimé, à Colmar, le soutien de la Nation à l’égard de cette souf­france si long­temps tue, « qui a laissé dans le cœur de chaque Alsa­cien et de chaque Mosel­lan une profonde et secrète bles­sure dont la douleur n’est pas éteinte », souli­gnant ce jour « que le destin tragique de ces hommes fait partie de notre histoire natio­nale, de notre mémoire collec­tive et que leur douleur mérite la compré­hen­sion et le respect. La compré­hen­sion et le respect que l’on doit à ceux auxquels nous lie le senti­ment profond d’ap­par­te­nir à une même nation frater­nelle qui a partagé tant d’épreuves ». Ces plus de 130 000 hommes, dont 30 000 perdirent la vie au combat et 10 000 restèrent portés dispa­rus, furent les victimes d’un crime de guerre. Il lui demande donc quelles dispo­si­tions le Gouver­ne­ment entend prendre afin d’in­té­grer les orphe­lins de ces incor­po­rés de force au champ couvert par le décret du 27 juillet 2004 et selon quel calen­drier de mise en œuvre.

Texte de la réponse

L’an­nexion de fait de l’Al­sace et de la Moselle par le IIIème Reich a comporté notam­ment l’in­cor­po­ra­tion forcée de jeunes Français dans l’ar­mée alle­mande. La secré­taire d’État auprès de la ministre des armées mesure plei­ne­ment l’éten­due du drame vécu par ces mili­taires et leurs familles au cours de la Seconde Guerre mondiale et souhaite rappe­ler que la France a reconnu leur situa­tion. En effet, le 1° de l’ar­ticle L. 111–2 du code des pensions mili­taires d’in­va­li­dité et des victimes de guerre (CPMIVG) dispose que les anciens mili­taires alsa­ciens et lorrains de la guerre 1939–1945, Français, soit par filia­tion, soit par réin­té­gra­tion, soit en exécu­tion du traité de Versailles, incor­po­rés de force par voie d’ap­pel, béné­fi­cient de la légis­la­tion sur les pensions mili­taires d’in­va­li­dité pour les services accom­plis dans les armées de l’Al­le­magne ou de ses alliés. L’ar­ticle L. 123–16 du même code précise que ces anciens mili­taires ont droit à pension dans les condi­tions fixées par le livre Ier du CPMIVG et, éven­tuel­le­ment, à toutes allo­ca­tions, indem­ni­tés, majo­ra­tions et supplé­ments de majo­ra­tions pour infir­mité résul­tant de bles­sures reçues, d’ac­ci­dents surve­nus, de mala­dies contrac­tées ou aggra­vées par le fait ou à l’oc­ca­sion du service. En outre, les orphe­lins des « Malgré-nous » ont égale­ment pu prétendre à un droit à répa­ra­tion confor­mé­ment aux dispo­si­tions de l’ar­ticle L. 142–1 du CPMIVG, tout comme ceux des Alsa­ciens et Mosel­lans réfrac­taires à l’in­cor­po­ra­tion forcée dans l’ar­mée alle­mande en appli­ca­tion de l’ar­ticle L. 143–1 du CPMIVG. Il convient d’ajou­ter que tous les orphe­lins de guerre, quel que soit leur âge, sont ressor­tis­sants de l’Of­fice natio­nal des anciens combat­tants et victimes de guerre et peuvent béné­fi­cier, à ce titre, de l’as­sis­tance de cet établis­se­ment public, dispen­sée notam­ment sous la forme d’aides ou de secours en cas de mala­die, absence de ressources ou diffi­cul­tés momen­ta­nées. Cepen­dant, il est souli­gné que l’in­dem­ni­sa­tion, mise en place par les décrets no 2000–657 du 13 juillet 2000 insti­tuant une mesure de répa­ra­tion pour les orphe­lins dont les parents ont été victimes de persé­cu­tions anti­sé­mites et no 2004–751 du 27 juillet 2004 insti­tuant une aide finan­cière en recon­nais­sance des souf­frances endu­rées par les orphe­lins dont les parents ont été victimes d’actes de barba­rie durant la Deuxième Guerre mondiale, est plus parti­cu­liè­re­ment desti­née aux victimes de la barba­rie nazie. Cette dernière renvoie à une douleur tout à fait spéci­fique, celle d’avoir perdu un père ou une mère, ou parfois les deux, dans un camp d’ex­ter­mi­na­tion. En effet, c’est fonda­men­ta­le­ment le carac­tère insou­te­nable d’ex­trême barba­rie propre à ces dispa­ri­tions spéci­fiques à la Seconde Guerre mondiale, le trau­ma­tisme dépas­sant le strict cadre d’un conflit entre États, ainsi que la compli­cité du régime de Vichy, comme l’a rappelé le Président de la Répu­blique, qui sont à l’ori­gine de ce dispo­si­tif réservé aux enfants dont les parents, résis­tants ou ayant fait l’objet de persé­cu­tions anti­sé­mites ou raciales, sont décé­dés en dépor­ta­tion ou ont été exécu­tés dans les circons­tances défi­nies aux articles L. 342–3 et L. 343–5 du CPMIVG. Ce dispo­si­tif, qui traduit une certaine respon­sa­bi­lité de l’État français, doit rester fidèle à sa justi­fi­ca­tion essen­tielle qui est de consa­crer solen­nel­le­ment le souve­nir des victimes de la barba­rie nazie, à travers leurs enfants mineurs au moment des faits. Le main­tien de cette spéci­fi­cité a donc été décidé pour ne pas porter atteinte à la cohé­rence de ces décrets. Au-delà de cette analyse, l’exa­men de plusieurs dossiers a laissé appa­raître la diffi­culté d’ap­pliquer des critères stricts permet­tant de distin­guer des situa­tions extrê­me­ment proches. Le minis­tère des armées s’at­tache donc à étudier les dossiers en cause au cas par cas, afin de garan­tir une égalité de trai­te­ment, tout en confir­mant la néces­sité de préser­ver le carac­tère spéci­fique de cette indem­ni­sa­tion dont l’ex­ten­sion à tous les orphe­lins de guerre ne saurait être envi­sa­gée.

 

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