Ce film est à nos yeux, à la fois: un viol de l’Histoire et un viol des consciences.
Le traité de Versailles avait fait, des populations de Moselle et d’Alsace, des Sujets de la République française. Hélas, la pleutrerie politique du gouvernement de la France, de 1938, 1939,1940, permettait déjà de dire » la France n’a pas été battue, elle a été vendue ».
Ce commerce d’abandon fut très lucratif pour le National-socialisme, mais de conséquences honteuses pour nos compatriotes des régions illégalement annexées. De Sujets, ils devinrent des objets dans les mains d’un système belliciste.
La « Das Reich » est venue en Normandie. Elle a opposé une résistance extraordinaire aux Alliés. Le moteur de cette résistance était le fanatisme hitlérien. Les combats furent d’une âpreté difficilement imaginable.
Et c’est lors de ces combats, et uniquement lors de ces combats que les Français incorporés de force dans les armées hitlériennes, purent s’extraire du carcan nazi.
Nous tenons à l’affirmer sur l’honneur, ce sont toujours les incorporés de force qui allèrent tendre leurs mains aux Normands, qui eux tendirent leurs cœurs à ces Français d’Alsace-Moselle.
Sur les 135 à 140000 incorporés de force dans les armées nazies, nous estimons à 800 ou 900 le nombre d’adolescents membres très involontaires de la »Das Reich » en Normandie.
Environ 300 furent tués et environ 200 s’évadèrent. Les autres furent faits prisonniers en se rendant.
Dans tous les cas d’évasion connus, ce sont toujours, nous disons bien toujours, les incorporés de force qui trouvèrent; lors des combats, une possibilité de s’évader. Les risques encourus par les familles devenaient moindres. Ils surent trouver aides et complicités dans la population normande. C’est ainsi qu’ils purent rejoindre les Forces de la France Libre. Cela nous donne à nous Normands, l’insigne honneur de considérer nos compatriotes incorporés de force comme étant, eux aussi, nos libérateurs.
Dans mon enfance, j’ai été le témoin oculaire, auditif et affectif, du drame des incorporés de force dans les armées nazies. Cela me permet de dire au réalisateur de ce film, que tant de contre-vérités, ne peuvent être que de propos délibéré. J’ajoute même qu’il faut être d’une conscience bien satisfaite, pour transformer des comportements pacifistes en comportements belliqueux. Alors, ne nous étonnons pas si, en raison d’un néfaste conditionnement, la majorité de nos compatriotes, après le procès de Bordeaux continue à croire, qu’il y a une justice alors qu’il n’y a seulement qu’une Administration judiciaire.
Ce film la « Das Reich » est aussi une inacceptable injure aux incorporés de force qui s’évadèrent.
En voici un exemple : Il eut lieu lors de la « Poche d’Avranches » fin juilllet- début août 1944. Monsieur Ménard est abordé par un jeune SS: « N’ayez pas peur, je suis Français comme vous, mais mis de force dans l’armée allemande. Et de confier photos, adresse des parents en demandant des vêtements civils. Finalement Monsieur Ménard accepte et obtient même en Mairie des faux papiers. Le jeune Alsacien s’en va. Grand malheur, il est reconnu par des gens de son unité. Il est soumis à la question mais ne dit rien. Le lendemain, des cris horribles attirent l’attention de deux couvreurs. Ils sont sur le toit du collège. Ils voient un spectacle horrible. Avec des cordages et des poulies le jeune Alsacien est écartelé vivant.Mais il ne dira rien. Par prudence Monsieur Ménard brûle les documents et l’uniforme. Nous ne savons donc rien sur ce jeune incorporé de force. Nous recherchons le nom de tous les Alsaciens disparus près d’Avranches en cette période. A titre posthume, il mérite la Légion d’Honneur, lui.
Nous sommes en mesure d’apporter les preuves de dizaines de faits historiques. Ils seraient propres à donner au film la » Das Reich » l’authenticité qui est écartée. Nous le ferions gracieusement car l’Honneur du peuple de France n’est pas à vendre.
N’en déplaise aux « monuments d’hypocrisie » qui de-ci, de-là se montrent dans des manifestations patriotiques, je tiens à dire, qu’étant ancien combattant, je refuserai à mon trépas que notre drapeau soit utilisé. Cela au motif que dessus est une tache : l’incorporation de force.
Jean BÉZARD, Normand, Secrétaire de la SNIFAM (Solidarité Normande aux Incorporés de Force d’Alsace-Moselle)