Avant le 29 juin 1944, date de la libération de Cherbourg, comme partout ailleurs, les combats faisaient rage dans la presqu’île du Cotentin.
Sur le territoire de la commune de La Glacerie, à quelques km de Cherbourg, dans une ferme située au lieudit « les Marettes » vivait la famille Voisin. Un fils de cette famille, prénommé Pierre qui devint instituteur se souvient; il avait alors 8 ans : un avion allié est venu s’écraser très très près de la maison d’habitation. En dépit du danger, les parents s’approchèrent. Les aviateurs étaient morts, sauf un. Il avait sauté avec son parachute et s’était approché près de la ferme. Il était gravement blessé: une balle dans une jambe et le visage brûlé.
Avant l’arrivée des Allemands, la famille Voisin parvint à le cacher dans une dépendance de la ferme : une écurie. Sa « couchette » était aménagée de telle sorte qu’en cas de danger, le dernier né de la famille Voisin: un bébé, sur une couverture, aurait été posé sur l’aviateur blessé. C’est ainsi que l’aviateur fut soigné, alimenté, avec les produits de la ferme.
Bien évidemment les Allemands vinrent sur les lieux et très probablement emportèrent les cadavres des aviateurs. Très peu de temps après des coups sont portés sur la porte de la pièce principale de la ferme. Deux soldats allemands entrent. La peur de la famille Voisin est très grande. Les deux soldats s’expriment en français. Ils se présentèrent comme étant des Français d’Alsace incorporés de force dans l’armée allemande et demandent des vêtements civils afin de pouvoir s’évader. Pour dissimuler leur crainte, leur peur, Mr et Mme Voisin offrent à manger. La conversation se poursuite et finalement des habits civils sont fournis. Les deux Français enterrent leurs uniformes. S’éloigner de la ferme, même en civil, présentait beaucoup de danger. Alors n’écoutant que leur compassion, les Normands cachent les deux Alsaciens avec l’aviateur. Ces derniers prodiguent à leur allié soins, réconfort et amitié.
Le lendemain peut-être ? À nouveau des Allemands! Ils donnent l’ordre d’évacuer les lieux. Mais l’aviateur n’est pas transportable…..! Alors les Alsaciens proposent de rester à ses côtés. La famille Voisin prend la route de l’exode, mais reste à proximité dans des abris creusés par des Allemands. Quelques jours après le 29 juin 1944, la famille Voisin est de retour. Le local, où étaient dissimulés les trois alliés, est absolument vide et dans un état d’ordre convenable.
Nous avons été aussi brefs que possible en relatant ces faits. Les deux Alsaciens ont su les embellir. Ils ont tout simplement, ainsi que les Normands, accompli des actes merveilleux en écoutant parler leur cœur.
Si les deux incorporés de force ont réussi leur évasion, ils auront très probablement raconté cette histoire à leur retour en Alsace. Nous comptons beaucoup sur leurs familles et sur toutes les personnes qui ont eu connaissance de ces faits. Ils s’inscrivent dans le modeste recueil des authentiques actes d’héroïsme qui eurent lieu pendant la bataille de Normandie.
Nous souhaitons vivement faire connaître la bravoure le courage des incorporés de force et ce, à la France toute entière. La discipline dans les armées nazies était pour les incorporés de force, d’une telle âpreté que c’est seulement en Normandie, lors des combats que les évasions étaient possibles
Jean BÉZARD, le 4 octobre 2014