La France a commémoré la fin de la guerre de 1914–1918. Pendant une semaine d’itinérance mémorielle, il a été rappelé aux jeunes générations les horreurs de la guerre, les millions de morts, les actes de bravoure, les grandes batailles, Verdun, le Chemin des Dames, les maréchaux Foch, Pétain… ce qui nous a amenés au souvenir de la guerre de 1940.
Au premier rang des nations invitées de trouvaient l’Allemagne et la Turquie. Les vaincus étaient élevés au niveau des vainqueurs.
Parmi nos alliés de la Première Guerre mondiale, je cherchais la Serbie ; elle avait été reléguées au fond de la tribune !
Cette commémoration a été placée sous le signe de l’amitié et de la réconciliation franco-allemande, du couple franco-allemand.
Les discours étaient beaux et graves. Nous vivons un moment unique au firmament de l’Histoire, nous sommes sur le chemin de la paix éternelle en Europe. Un rêve.
Attentive aux discours, j’attendais :
– une parole destinée aux 380 000 familles de « Malgré-Nous » de la Première Guerre mondiale. Pas un seul mot. Ils furent oubliés.
Oubliés. Le président Chirac refusa de leur attribuer la Légion d’honneur comme il le fit pour les autres soldats survivants de la Première Guerre mondiale sous prétexte qu’ils avaient servi dans une armée étrangère. Par la faute de qui ? Nos trois départements furent lâchement abandonnés par l’Assemblée Nationale siégeant à Bordeaux et par monsieur Thiers qui « en même temps » exhortait la population de l’Alsace et de la Moselle à ne pas quitter leurs villes et leurs villages afin qu’ils puissent un jour être réunis à la France
– une phrase commémorant le retour de nos trois départements à la France.
En vain.
Quand on se souvient de la liesse de nos populations, le 11 novembre 1918, heureuses de retrouver la Mère Patrie, cela fait de la peine…
Les « Malgré-Nous » de la Première Guerre mondiale sont « sortis » de l’Histoire officielle.
Pour ma part, je refuse que les enrôlés de force de la Seconde Guerre mondiale connaissent le même sort et soient sacrifiés sur l’autel de la réconciliation franco-allemande.
L’Allemagne doit assumer son passé et reconnaître l’incorporation de force comme crime contre l’humanité.
Paraphrasant Albert Camus, Prix Nobel de Littérature qui a écrit à propos de l’Algérie : « entre la justice (l’indépendance) et ma mère (pied-noir attachée à sa terre natale), je choisis ma mère ». Je dis « entre mon oncle Armand (et ses compagnons d’infortune) et l’amitié franco-allemande, je choisis mon oncle ».
Après tant d’émotions, la sagesse commandait de prendre un peu de repos. Aussi, ai-je terminé la journée en relisant le livre de l’auteur allemand Marie-Louise Fischer, Heirat ohne Liebe.
Renée Baudot